La réforme législative du chèque en Tunisie, entrée en vigueur en août 2024, introduit des mesures visant à sécuriser et moderniser les transactions financières dans le pays. Bien qu’elle adresse des problématiques comme les chèques sans provision (CSP), elle suscite aussi des critiques, notamment sur son impact potentiel sur les petites entreprises et les populations vulnérables. L’intégration d’un cadre renforcé pour le microcrédit pourrait atténuer ces effets négatifs, offrant ainsi des alternatives viables.
1. Contexte et objectifs de la réforme
Les chèques sans provision ont longtemps pesé sur l’économie tunisienne, générant des pertes importantes et un climat de méfiance dans les transactions. Pour y remédier, la réforme de 2024 renforce les sanctions contre les CSP et introduit des outils numériques comme les chèques électroniques. L’objectif est de réduire les pratiques frauduleuses, améliorer la traçabilité et promouvoir un système bancaire plus transparent.
Cependant, cette réforme soulève des inquiétudes concernant l’accès au financement des petites entreprises et des populations exclues du système bancaire.
2. Les principales mesures de la réforme
a. Durcissement des sanctions contre les CSP
Des amendes lourdes, une interdiction d’émettre des chèques, et une inscription des débiteurs dans des registres publics sont désormais en vigueur. Si ces mesures visent à renforcer la discipline, elles pourraient aussi pénaliser ceux qui utilisent les chèques comme moyen de crédit informel.
b. Introduction du chèque électronique
Le chèque électronique simplifie et sécurise les transactions via des plateformes numériques. Bien que cela améliore la traçabilité, les populations ayant un accès limité à la technologie risquent d’être exclues.
c. Gestion des chèques à risque
Un système renforcé permet aux banques de repérer les émetteurs à risque. Cependant, cela peut rendre l’accès aux services bancaires plus difficile pour les petites entreprises dépendant des chèques pour leurs besoins de financement.
3. Les enjeux économiques et sociaux
a. Rétablir la confiance dans le système bancaire
La réforme vise à améliorer la transparence et la sécurité, ce qui peut favoriser une économie plus stable à long terme.
b. Risques d’exclusion financière
En rigidifiant l’usage des chèques, les populations vulnérables et les petites entreprises risquent d’être marginalisées. Ces groupes dépendent souvent des chèques pour des transactions ou crédits à court terme.
4. Les critiques de la réforme
a. Une perte de flexibilité pour les petites entreprises
L’élimination progressive des chèques papier pourrait limiter l’accès rapide au crédit pour les entrepreneurs du secteur informel.
b. Fracture numérique
La transition numérique impose une infrastructure et des compétences que tous ne possèdent pas, augmentant ainsi les inégalités.
-5. Le rôle du microcrédit comme solution alternative
a. Un levier d’inclusion financière
Le microcrédit est une alternative pour financer les populations exclues du système bancaire classique. Il peut soutenir les petites entreprises, les travailleurs informels, et les femmes entrepreneures, notamment en milieu rural.
b. Nécessité d’une régulation stricte
Pour être efficace, le microcrédit doit être régulé afin d’assurer des taux d’intérêt justes, prévenir le surendettement, et garantir une transparence totale. Un suivi rigoureux des emprunteurs est indispensable pour maximiser l’impact économique et social.
c. Microcrédit et numérique
Intégrer les technologies numériques dans le microcrédit pourrait élargir son accessibilité. Des plateformes sécurisées faciliteraient la gestion des prêts et permettraient une meilleure transparence.
6. Conclusion
Bien que la réforme des chèques en Tunisie vise à sécuriser les transactions et à moderniser le système bancaire, elle risque d’exclure les petites entreprises et les populations vulnérables. Dans ce contexte, le microcrédit, accompagné d’un encadrement rigoureux, pourrait offrir une alternative efficace, en comblant les lacunes du système financier traditionnel et en favorisant une inclusion économique plus large.
Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour développer un écosystème financier équilibré, capable de répondre aux besoins de tous les acteurs économiques, tout en minimisant les risques d’exclusion.