À partir du 2 février 2025, la Tunisie entamera une véritable révolution dans ses pratiques de paiement avec l’entrée en vigueur de la nouvelle législation relative à l’usage des chèques. Jusqu’à présent, les chèques étaient couramment utilisés comme un moyen de garantie de paiement ou pour effectuer des paiements différés, une pratique ancrée dans les habitudes économiques des Tunisiens. Cette tradition, qui représente des centaines de millions de dinars en circulation chaque année, est sur le point de disparaître. Quelles seront les conséquences de cette réforme pour les acteurs économiques, et surtout, quelle est la responsabilité des banques dans la transition vers un nouveau modèle ?
### Une Fin de Pratique Bien Ancrée
Le chèque, tel qu’il est utilisé en Tunisie, a longtemps servi de mécanisme de garantie entre particuliers et entreprises. Que ce soit pour l’acquisition de biens de consommation durables, le règlement de dettes ou des transactions commerciales, l’usage du chèque postdaté permettait aux utilisateurs de différer leurs paiements tout en offrant une certaine sécurité aux créanciers. Ce mécanisme était d’autant plus utile dans un contexte économique difficile, où l’accès au crédit et aux liquidités était souvent restreint.
Cependant, cette pratique a également eu des effets pervers. Elle a mené à une augmentation des incidents de chèques sans provision, une surcharge des tribunaux avec des litiges liés à des chèques impayés, et une distorsion des relations commerciales basée sur une confiance souvent mal placée.
### La Nouvelle Législation : Un Changement Radical
La nouvelle législation interdit formellement l’usage des chèques comme moyen de garantie à partir de février 2025. Ce tournant législatif impose une nouvelle approche de gestion des paiements dans l’économie tunisienne, exigeant des entreprises et des particuliers de repenser leurs pratiques financières. Les paiements différés par chèque ne seront plus possibles, ce qui forcera les acteurs économiques à trouver des alternatives fiables.
### Le Rôle des Banques : Une Responsabilité Accrue
Dans ce contexte, les banques tunisiennes doivent jouer un rôle central dans la transition. L’une des solutions envisagées est l’accroissement des crédits à la consommation, pour permettre aux ménages et entreprises de continuer à financer leurs achats sans avoir recours aux chèques différés. En favorisant des solutions de crédit plus flexibles et accessibles, les banques pourraient compenser l’arrêt des pratiques de garantie par chèque.
Il est crucial que les établissements bancaires assument pleinement cette responsabilité en offrant des produits financiers adaptés à la nouvelle donne. L’accès au crédit doit être simplifié, les taux d’intérêt plus compétitifs, et les délais de traitement réduits pour éviter de pénaliser l’économie réelle. Sans cela, le risque est que de nombreux acteurs économiques se retrouvent dans une impasse, sans moyens de financement à court terme.
### La Monétique : Un Levier de Modernisation
Parallèlement, cette réforme doit s’accompagner d’une accélération de la digitalisation des paiements. La monétique, c’est-à-dire l’utilisation des moyens de paiement électroniques, doit se généraliser. Les cartes bancaires, les virements instantanés, et les solutions de portefeuille électronique offrent des alternatives modernes, rapides, et sécurisées. Pour ce faire, les banques devront investir davantage dans l’infrastructure numérique, éduquer leurs clients sur l’utilisation de ces outils et renforcer la sécurité des transactions en ligne.
La disparition du chèque en tant que moyen de garantie à partir de février 2025 est un tournant important pour l’économie tunisienne. Les entreprises et les particuliers devront s’adapter rapidement à ce changement, en se tournant vers des solutions alternatives pour les paiements différés. Mais la réussite de cette transition repose avant tout sur la capacité des banques à proposer des produits de crédit adaptés et à promouvoir des moyens de paiement électroniques modernes. Il est temps pour le secteur financier de jouer un rôle décisif dans la modernisation de l’économie tunisienne, en facilitant l’accès au crédit et en accélérant l’adoption de la monétique.